David Toscana, les romans évoqués dans votre Último lector peuvent être vus comme des personnages à part entière. En cours d’écriture, les avez-vous traités comme tels ?
Je suis très content que vous l’ayez remarqué, parce que oui, l’idée est qu’un livre marquant a un esprit qui lui est propre et, de cette façon, les livres sont traités comme des personnages dans mon roman ; mais dans la vraie vie, des livres sont comme des personnes, ou des expériences vécues. C’est difficile à expliquer, car nous parlons d’un roman avec de la fiction dans la fiction, mais j’irai un cran plus loin en affirmant que Babette n’est pas un personnage, mais une vraie personne comme Lucio ou Remigio ; et donc, la Mort de Babette n’est pas un livre, c’est la mort de Babette, un événement.
Les vrais lecteurs sont persuadés que Gregor Samsa est réellement devenu un insecte, qu’un misérable ivrogne rencontré dans la rue s’appelle Marmeladoy, qu’ils pourraient aimer madame Bovary plus que Madame Bovary, que la chrétienté n’existe pas à cause du Christ mais à cause de ce merveilleux roman appelé la Bible, et qu’ils doivent plus à Don Quichotte qu’à leur propre père.
Croyez-vous, comme Lucio, en ce « présent permanent » de la littérature ? Est-ce votre réponse à la mort ?
J’aimerais que cela puisse être une réponse à la mort, mais c’est seulement une protestation qui ne sera pas entendue.
Savez-vous sur quoi portera votre prochain roman ?
Oui, je suis en train d’écrire une histoire qui va lier à un niveau émotionnel ma ville, Monterrey, à Königsberg, à l’est de la Prusse, à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Entretien réalisé par Christine Jeanney pour Culturofil (Propos traduits de l’anglais par Delphine Kilhoffer)